Happy time (mj)

Poudlard allait bientôt rouvrir. Le seul point noir c’était le Directeur. Pas que je ne l’aimais pas, au contraire, c’était quelqu’un de plutôt intègre, qui faisait le boulot et même s’il allait sans doute faire le parfait directeur pour l’institut, savoir qu’il avait été nommé par la ministre en personne ne me plaisait pas. Je n’aimais pas l’idée que le ministère mette son nez dans les affaires de l’école. On ne formait pas des jeunes pour qu’ils pensent comme ceux basés au ministère, mais bien qu’ils fassent leur vie comme ils l’entendaient, et cela ne m’annonçait rien de bon. Peut-être me fourvoyais-je mais lorsque la ministre m’avait demandé personnellement d’envoyer des aurors pour la surveillance de l’école, étrangement, j’avais ce sentiment que mes impressions étaient totalement fondées. J’allais donc devoir envoyer mes hommes, même si cela ne me plaisait pas. Les ordres de missions sur mon bureau, je les observais silencieusement. Emerson en tête – était l’auror en qui j’avais le plus confiance. Je n’étais peut-être pas objectif mais il m’avait prouvé maintes et maintes fois que je pouvais me fier à lui les yeux fermés, surtout en ce qui concernait les affaires de l’école – le ministère ne saurait que le strict minimum venant de lui. Londubat – on pouvait dire ce que l’on voulait de lui, il avait ses méthodes que je ne cautionnais pas, mais il fallait le reconnaitre il était du même acabit que mon filleul, s’il ne voulait rien dire rien ne s’échapperait de sa tête. Ripper, je lui faisais confiance, même s’il ne se sentait pas légitime ici, il avait lui aussi prouvé qu’il était au bon endroit et puis, il me semblait que l’homme qui partageait sa vie, enseignait à Poudlard. Au moins, ils pourraient se voir un peu plus souvent que d’habitude. Hopkins, lui qui détestait travailler en binôme allait pouvoir se la jouer solitaire à Poudlard. Et puis, il y avait Carter, professeur depuis quelques années à Poudlard. Cela suffisait amplement pour la sécurité des enfants. Même si, soyons honnêtes, aurors ou pas présents sur site, si les chasseurs voulaient réattaquer le Château, ils y arriveraient sans aucun problème, comme les mangemorts. Ils étaient bien trop nombreux, et bien trop organisés pour que l’on puisse y faire quelque chose.


J’ai empilé tous les ordres de mission – dument signés par tous les aurors qui se rendraient à Poudlard dans deux jours - dans une pile parfaitement alignée – je n’aime pas le désordre – et j’ai rangé le stylo bien parallèle au porte-nom qui se trouvait au milieu du bureau – des fois que l’un de mes hommes oublie comment je me prénommais. Le bureau parfaitement rangé, je me suis levé, sifflant Anatole pour qu’il se réveille. Il était temps de retrouver ma fille. Depuis l’attaque du Picses, je la trouvais un peu éteinte. Je pouvais que comprendre ce qu’elle vivait. Son lieu de travail, et de prédilection avait été attaqué, son patron se trouvait encore à l’hôpital, et je crois que l’arrestation de son frère lui avait mis un coup au moral. J’avais fait tout ce que je pouvais pour la protéger ce jour-là, mais même si physiquement, elle n’avait rien eu, le psychologique, lui avait été bien atteint. Comme la plupart de ceux qui s’étaient trouvés là, ce soir-là. Même moi, et pourtant, j’avais l’habitude, formé pour ça, j’avais eu un sentiment d’échec face à cette attaque. Pris au dépourvu, sans que l’on ne puisse rien y faire, on s’était battu contre des ennemis, quasiment inconnus et surtout très inattendus – les anteawichs n’auraient jamais du se trouver là. L’enquête était toujours en cours et aucun de ceux qui avaient été arrêtés n’avaient lâchés les raisons de leur venue sur le sol britannique. Et je reconnais que cela m’agaçait. Mais le jour n’était pas l’enquête, j’avais décidé de m’occuper de ma fille et l’emmener dans un endroit qui – même si cela n’allait pas lui faire totalement oublier ce qu’il s’était passé – allait quand même lui montrer que tout n’était pas noir dans la vie. Je suis sorti du ministère silencieux. Il fait dire que le samedi, il n’y a jamais grand monde dans les couloirs. Je devais être l’un des rares à venir passer une matinée dans mon bureau les samedis. Arrivé sur la plateforme de transplanage, j’ai attrapé Anatole et j’ai transplané chez moi, juste devant ma porte. Ana n’allait sans doute pas tarder à arriver. J’ai passé un jean et une chemise blanche. Même si je me trouvais bien plus confortable dans mes costards, je reconnais que pour aller là où je voulais ce n’était pas la tenue appropriée.

Quand j’ai ouvert la porte, je reconnais que je ne m’étais pas attendu à son nouveau look. Le blanc de ses cheveux m’a fait pencher la tête à gauche avant de lui offrir un grand sourire. C’était inattendu mais cela lui allait bien. Je l’ai embrassé sur la joue pour la saluer. Je m’étais toujours demandé d’où elle tenait sa petite taille. Sans être grande Esther ne faisait pas partie des plus petites. Ses parents étaient relativement grands, et de mon côté, nous étions tous plutôt grands. Cela m’avait toujours étonné. Quand elle m’a lâché, j’ai attrapé une longue mèche de ses cheveux. « C’est surprenant mais ça te va bien… Comment tu vas ? » lui ai-je lancé, en la laissant entrer dans l’appartement. Je lui ai fait un grand sourire sans répondre à sa question. « Tu veux boire quelque chose avant de partir ? ». J’aime bien garder le secret, c’était bien plus intéressant et plus drôle. « C’est assez loin, on mangera là-bas » ai-je ajouté en enfilant mon blouson de cuir.

@Anastasia H. Greene

J’ignorais si la sortie allait lui faire du bien, l’apaiser au moins pour un temps, lui rendre un peu le sourire que j’aimais tant, mais il fallait quand même tenter le coup. Je ne pouvais rien faire pour la reconstruction du Picses, je ne pouvais pas non plus lui dire que tout irait bien, que tout allait s’arranger, parce que non. Rien ne s’arrangerait, tant que les cons survivaient. Et Merlin savait, qu’il y en avait pléthore des cons sur cette planète. En tout cas son enthousiasme me faisait plaisir. C’était déjà ça de pris, même si je savais, au fond, que la sortie lui plairait. La réserve galloise ne pouvait que lui plaire. Elle, la fanatique des animaux, qui faisait tout pour les sauver – mon auror s’en souvient encore de son passage dans son bureau. La réserve galloise comportait beaucoup d’animaux aussi excentriques les uns que les autres. Il y en avait beaucoup de passage, qui n’étaient là que pour attendre un transporteur qui les ramèneraient chez eux, mais certains y restaient à l’année. Les réserves magiques fonctionnaient exactement comme les zoos non-mages. Les espèces que l’on y trouvait étaient simplement différentes. Je crois même que dans la réserve galloise il y avait des specimens de dragon, mais je ne saurais dire lesquels.


Je l’ai attiré à moi, par la main qu’elle me tenait, pour la serrer contre moi. « Je veux profiter de toi, avant de partir ». Cela faisait trois mois que je l’avais retrouvé, et je voulais en profiter. Rattraper le temps perdu, même si au fond je savais que cela n’arriverait jamais. Rattraper vingt-quatre ans d’absence était tout bonnement impossible mais je ferais tout pour. C’était une certitude. J’aimais la prendre dans mes bras, la toucher, pour être sûr que, non, je ne rêvais pas et qu’elle était bien là, avec moi. A mes côtés, après toutes ces années loin de moi. Je l’ai embrassé sur le haut de la tête, en hochant la mienne. « Si je te donne un indice, tu trouveras et cela ne sera plus une surprise » ai-je répondu à sa demande. « Mais cela te plaira » ça, j’en étais persuadé. Peut-être que cela manquerait d’artisanat moldu pour parfaire la journée, mais cela dit si c’était pour me le détourner, je préférais l’en éloigner. « Tu es prête pour le transplanage d’escorte ? » Peu étaient les sorciers qui aimaient le transplanage d’escorte. Il donnait mal au ventre, une envie de vomir présente, et cette impression de ne pas être maitre de son corps pouvaient procurer une angoisse chez ceux qui le subissaient. Mais il était nécessaire, quelque fois.

La gardant contre moi, j’ai transplané au Pays-de-Galle, non loin de la Réserve. Elle était située en pleine campagne, non loin de la mer du Nord. Il y avait du vent mais étrangement, il ne faisait pas froid. J’ai lâché ma fille pour qu’elle reprenne un peu ses esprits. Je n’avais jamais aimé le transplanage d’escorte, et j’avais bien été content de passer mon permis à Poudlard, pour enfin pouvoir me conduire moi-même à l’endroit de mon choix sans dépendre de quelqu’un d’autre. Je détestais ne plus avoir de contrôle sur mon corps, c’était flippant et angoissant. Ma claustrophobie n’aidait en rien. Quand on me transplanait, j’avais le sentiment d’être enfermé sans avoir la moindre chance de trouver une issue. Encore plus inquiétant. « Ça va ? » lui ai-je demandé, en observant le paysage, et sa plaine à perte de vue. L’herbe bien verte frémissait sous les bourrasques de vent. J’ai enfilé mon coupe-vent. « Nous sommes au Pays de Galle. » ai-je ajouté, en guise d’indice sur notre destination finale. « Il faut qu’on marche un peu, c’est à une dizaine de minutes par là-bas » ai-je lancé en désignant la colline dans le fond.

@Anastasia H. Greene

Je crois que je me suis senti rougir à ses paroles. J’avais attendu cet instant pendant si longtemps, que c’était étrange de le vivre aujourd’hui, et qu’elle soit réellement contente de le passer en ma compagnie. On ne se connaissait pas. En à peine trois moins, c’était impossible, j’avais tant de chose à rattraper. Mais être ici, avec elle, c’était si… apaisant. En réalité, je n’avais pas vraiment de mots pour décrire ce que je ressentais. Je voulais profiter d’elle, et je voulais lui faire – un peu – oublier ce qu’il s’était passé dans son bar fétiche. Cela me déplaisait qu’elle ait vécu ça, et parfois, je me disais qu’elle aurait été mieux aux Etats-Unis, loin de tout ça. Loin de moi. Ça me faisait mal d’y penser, mais je restais le Chef des aurors, et rien qu’avec ce statut, je mettais tous mes proches en danger, elle en premier. Et ce n’était pas une petite journée, juste elle et moi, qui allait tout faire oublier. Mais j’allais tout faire pour qu’elle profite au maximum de sa journée. J’étais ému de n’être qu’avec elle, comme une vraie famille, comme on aura dû l’être depuis longtemps. Je n’aurais jamais pensé qu’elle m’accepterait aussi vite, comme son frère d’ailleurs. J’avais été si loin d’eux, pendant si longtemps, et je n’étais rien pour eux, et si Esther n’avait pas gardé les lettres que je leur avais écrites, ils ne sauraient toujours pas ce que je représentais pour eux. J’ai inspiré longuement, gardant mes émotions un peu trop présentes, pour moi. Et j’ai transplané au Pays-de-Galle. Transplanage d’escorte qui n’était pas pour plaire à ma fille, qui se trouvait être un peu pâle en touchant le sol. En même temps, je ne connaissais personne qui supportait le transplanage d’escorte, moi le premier. J’avais l’impression d’être enfermé dans mon corps, incapable de le contrôler, un sentiment d’oppression et de mort imminente m’envahissait à chaque fois que j’avais dû le subir. Autant dire que j’avais mis tous mes efforts à passer le permis de transplanage lorsque j’étais à Poudlard. Pour ne plus à vivre les sensations horribles de l’escorte.


La réserve animalière était connue et réputée. Personnellement, je ne la connaissais que par mon boulot et les gens qui faisaient du trafic illégal d’animaux. Je n’y avais jamais réellement mis les pieds, en tout cas pour la visiter. J’avais ramené un Womatou, une fois. Là-bas. Mais en général, ce n’était pas moi qui me rendais sur place. Privilège ou malheur d’être Chef des aurors. Le terrain n’était plus la priorité, et je reconnais que cela me manquait terriblement. La campagne galloise était belle, et en marchant jusqu’à la réserve, je me rendais compte à quel point mon pays natal m’avait manqué pendant toutes mes années aux Etats-Unis. J’avais adoré mon séjour américain, j’y avais fait de fabuleuses rencontres, mon meilleur ami et mon filleul, mais la Grande-Bretagne restait encore et toujours mon égérie. Sans aucun conteste. Surtout lorsque j’arpentais les campagnes. Et je reconnais que j’avais une petite pointe de fierté à être Britannique lorsque je voyais ma fille s’arrêter tous les deux mètres pour observer le paysage. L’Amérique avait sa beauté bien à elle, et l’Ouest américain, je pourrais le parcourir de long en large et en travers, tant c’était magnifique mais le vert gallois qui parcourrait les champs était encore plus sublime que le jaune désert du Grand Canyon. « Avances, tu le sauras bien plus vite » lui ai-je lancé, sans rien dire de plus. La surprise devait être totale, sinon cela n’était plus une surprise. Et j’admets que j’avais envie de revoir son regard de petite fille que je lui connaissais quand elle verrait enfin la Réserve. Elle avait disparu de ma vie à l’âge de trois ans, et la voir à l’âge de vingt-huit ans devant moi, me faisait si étrange… j’en avais loupé des sourires émerveillés de gamine qui découvre le monde. Et dire qu’elle leur avait fait à mon ex-femme – ça encore je pouvais l’accepter – mais à ce connard de Poole, qu’elle appelait papa. C’était mon titre ça, et ça me faisait mal de savoir qu’elle avait pu le dire à quelqu’un d’autre, qu’à moi – même s’il n’avait jamais vu ses premiers pas, ses premiers mots… ça, ça n’appartenait qu’à moi, et ils étaient bien enfouis dans Ma Pensine. Personne ne me les enlèverait, ces souvenirs que j’avais d’elle.

Je l’ai rattrapé par la taille, un grand sourire sur les lèvres. Cela me faisait plaisir de la voir ainsi. « Bienvenue à la Réserve Magique du Pays-de-Galle. Il y en a plusieurs en Grande-Bretagne, mais celle-ci, c’est la plus grande et c’est, surtout, la seule que je connais réellement. » ai-je lancé, avant de lui faire une bise sur le haut de la tête. « Je te laisse maitre de la journée. Je me contente de te suivre ».

@Anastasia H. Greene

Il y a tant de choses que j’aurais voulu partager avec mes enfants, et que je ne pourrais jamais. A moins d’avoir une vie éternelle. Rattraper vingt-quatre ans était tout bonnement impossible, mais essayer était déjà pas mal. Certes, l’attaque au Picses avait été un prétexte pour l’emmener. Elle avait besoin de ça. Je n’allais pas détourner de l’artisanat moldu pour lui changer les idées – bien que l’idée, j’en étais sûr, pourrait lui plaire. Mais même si, moi, cela pourrait me plaire, cela restait illégal, et je restais auror. Et cela ne serait vraiment pas rendre hommage à mon père que de faire ça, lui qui avait bossé toute sa vie dans le Service de détournement de l’Artisanat Moldu au Ministère. Et puis, aller voir toute sorte d’animaux plus étrange les uns que les autres n’était pas pour me déplaire, du moment que cela convenait à ma fille et que cela lui faisait plaisir, je pouvais supporter les bestioles pendant une journée. Je reconnais qu’à part mon chien, les autres animaux n’avaient pas réellement mon attention. Pour tout dire, ce n’était pas ma tasse de thé, et j’avais carrément autre chose à faire que de courir après. Je l’ai donc suivi dans les dédales de la réserve. On travaillait régulièrement avec eux, lorsque l’on stoppait un trafic illégal de créatures magiques. On était loin de tous les arrêter, le marché des créatures magiques était en expansion, et lorsqu’un réseau était arrêté, un autre prenait le relais. C’était un peu frustrant et énervant de ne pas réussir à éradiquer entièrement ce marché noir. Malheureusement, il y avait bien trop de monde qui y participait, bien trop d’intermédiaire et pas assez d’aurors pour les arrêter. Et nous n’avions pas que ça à gérer. La chasse aux mages noirs prenait quatre vingt dix pour cent de notre temps, le reste n’avait que très peu de places. Le phénix a toujours été une créature étrange. Immortelle, guérisseuse, loyale et absolument magnifique pour ne pas le remarquer.


Ça m’a un peu surpris qu’elle me parle un peu de son enfance. J’admets que je n’étais pas sûr d’avoir envie de tout savoir de ce qu’il se passait avec Poole, je crois que j’en savais suffisamment pour avoir envie de lui casser la gueule à chaque fois que je pensais à lui. Et étrangement, connaissant l’animal qu’était le jugomage cela ne m’étonnait guère. Il n’avait aucune curiosité intellectuelle, et tout ce qui n’était pas à sa hauteur – connard en somme – n’était pas digne de lui, et donc inutile. Les créatures magiques faisaient parties de cet énorme lot. Moi aussi, d’ailleurs. Sauf que dans mon cas, je me moquais bien de ce qu’il pouvait penser de moi désormais. J’ai posé ma main sur son bras. Cela me désolait d’apprendre ça. Je me sentais encore plus coupable de les avoir abandonné à ces deux crétins. Mais, même si leur enfance n’avait pas été la meilleure du monde, au moins Esther avait tenu sa promesse. Les envoyer tous les deux à Ilvermorny, et autant dire qu’avec son connard de mari – qui ne jurait que par la moldue attitude – c’était loin d’être gagné. Pour tout dire, j’avais toujours cru qu’elle n’honorerait pas sa promesse. Et quand j’étais venu le premier jour à Ilvermorny pour la voir, je l’admets je ne m’étais pas attendu à la voir. « Ce n’est pas grave de ne rien savoir en arrivant, l’important c’est ce que tu sais à l’arrivée. Et puis, tu connaissais d’autre chose que les autres ignoraient. C’est ce qui fait votre force, à chacun. » lui ai-je lancé, même si je comprenais son ressenti d’arriver dans un endroit et de se sentir si éloigné que la question « du qu’est-ce que je fous là » n’arrêtait pas de trotter dans notre tête. Je l’avais souvent été, pas à ma place. Au sein de ma famille, un peu comme l’extra-terrestre dont on ne sait pas quoi faire. A Poudlard, avec mon accent mi-américain, mi-anglais – parce que oui, à force d’habiter là-bas on en prend les mauvaises habitudes. Au milieu de mes deux gamins, que je n’avais pas vu depuis vingt-quatre et dont ma légitimité laissait à désirer. Alors, oui, je savais. Mais l’important était d’avoir réussi à rattraper son inculture, comme elle disait, et de l’avoir transmis à son frère. Et puis, l’inculture n’existait pas. Elle n’avait juste pas la même que les autres. « Je t’ai trouvé très mignonne dans ton uniforme » ai-je ajouté, une façon de dire que oui, j’étais là pour son premier jour là-bas même si elle, elle ne le savait pas. L’uniforme d’Ilvermorny était bleu et rouge. Je n’étais pas très friand de ces couleurs – et je me disais que les uniformes de Poudlard étaient bien plus passe-partout que ceux d’Ilvermorny.

@Anastasia H. Greene

Je me suis souvent demandé ce qu’il se serait passé si je ne l’avais jamais rencontré. SI je ne l’avais pas suivi, si l’on ne s’était pas mariés. La vie aurait été sans doute moins compliquée, mais elle aurait été nettement moins belle. Même si j’avais été séparé d’eux pendant vingt-quatre, je ne pouvais concevoir ma vie sans eux. Ils étaient ce qu’il m’était arrivé de mieux, et même si nous avions beaucoup de choses à rattraper tous les trois, j’étais heureux de les avoir. J’avais suivi leur vie de loin sans me douter une seule seconde de ce qu’ils pouvaient vivre là-bas, dans les Rocheuses. La secte était éloignée de tout, c’était de notoriété publique que le dirigeant était un profiteur-manipulateur, mais on ne pouvait rien y faire, les gens s’y trouvaient de leur plein gré, et tant qu’aucun d’eux ne venaient porter plainte, les autorités moldues ne pouvaient rien y faire. Mais même si je hurlais de rage contre Esther de m’avoir évincé de la vie de nos enfants, je lui avais toujours fait confiance sur la vie qu’elle leur donnerait. Jamais je n’aurais pu imaginer qu’elle puisse laisser faire Poole. Et honnêtement, même l’affection que je lui portais toujours – elle restait la mère de mes enfants – je crois que si je la croisais, là, maintenant, je serais incapable de garder mon sang-froid. Je suis passé derrière Ana pour passer mes bras autour d’elle, et l’embrasser dans le cou. « Tu y appris beaucoup de choses, là-bas. Et sans elle, je ne t’aurais pas retrouvée assise dans mon bureau » Heureusement que mon père n’était plus de ce monde, je crois qu’il aurait fait une syncope en voyant sa petite-fille détourner la technologie moldue. Mais sans cela, jamais je n’aurais retrouvé ma fille. Et rien que pour ça, je ne pouvais dire que Merci à Poole et ses lubies crétines.

Sans ça, les deux seraient sans doute encore en train de l’appeler « papa » - rien que ça, cela me faisait grimacer – et ne connaitrait toujours pas mon existence. Je me demandais, encore, comment Esther avait réussi à ternir sa promesse envers moi et leur permettre de faire leur scolarité à l’école de magie. J’ignorais ce qu’elle avait promis à Poole, au fond je n’avais pas spécialement envie de le savoir, c’était son problème et je n’en avais que faire, mais cela m’intriguait. Poole n’était pas du genre à faire des concessions, et vu son aversion pour la sorcellerie – bien qu’il l’utilisât lorsque cela l’arrangeait – il était étrange qu’il ait dit aussi facilement oui pour les laisser partir à Ilvermorny. J’admets que j’aurais préféré qu’ils fassent leur scolarité à Poudlard, comme moi, mais là, je crois que je demandais un peu de trop dans leur complaisance. Et j’avais déjà accepté de ne plus rien tenter pour les récupérer si elle acceptait, je ne pouvais pas faire plus. Mais, même si aucun des deux ne me connaissait j’avais fait en sorte d’être là pour leur rentrée à Ilvermorny. Pour les deux, j’avais été présent dans la salle de réception, pour leur cérémonie de répartition. J’ignore si Esther le savait que je les avait vu ce jour-là, et j’admets qu’aujourd’hui, je n’en avais plus rien à faire. J’ai hoché la tête dans la positive, avant de resserrer un peu plus mes bras autour d’elle. « Et j’étais tellement fier. » Fier d’elle, de la petite jeune fille qu’elle était devenue. Je l’ai embrassé sur la tempe avant de me redresser et m’accouder la barrière à côté de nous. Elena, elle m’en avait beaucoup parlé, mais je ne l’avais jamais vu, même lorsque je venais certains soirs au Picses. « Je suis content que tu l’aies rencontrée » Sans elle, je n’étais pas sûr que nos retrouvailles avec ma fille se seraient faites. Poole avait la technique pour endoctriner les gens, sinon il n’aurait pas autant de monde dans sa secte, surtout au milieu des Rocheuses, là où il n’y a absolument… rien. « J’aimerais bien la rencontrer, ton Elena, juste pour lui dire merci » J’ai observé le Phénix. Je trouvais ces bêtes-là très majestueuses et d’une prestance inégalée. Ils avaient des capacités hors normes, et posséder un Phénix était un signe d’une véritable générosité. Et peu de personne pouvait prétendre à l’être. Je me suis redressé en fronçant les sourcils, ma curiosité piquée au vif. Ou simplement, mon instinct d’auror qui se mettait en branle. Même si elle n’avait pas terminé sa phrase, je savais ce qu’elle voulait. Enquêter. Sur qui, sur quoi, pourquoi. Telle était la question. Je l’ai pourtant suivi dans les dédales de la Réserve. « Ana… attends. » Je me suis mis à sa hauteur sans pour autant l’arrêter dans ses pas. « Il y a un problème avec Elena ? » Mon instinct de déduction me disait que c’était en rapport avec sa meilleure amie, même si je n’en étais pas sûr. Et maintenant, elle en avait bien trop dit pour que je n’insiste pas. Je ne suis pas enquêteur professionnel pour rien.

@Anastasia H. Greene

Les deux meilleurs jours de ma vie, c’était ceux de leurs naissances. Ils m’avaient comblé avant même qu’ils ne viennent au monde. Et j’en voulais terriblement à Esther de me les avoir enlevés ainsi. De les avoir mis entre les pattes de ce connard de Poole. Je n’avais aucun autre mot pour le qualifier. Je me sentais coupable de les avoir abandonné, et même si aujourd’hui, je les avais tous les deux retrouvés, ma culpabilité ne partirait sans doute jamais. Tout aurait été bien plus simple si je m’étais battu pour eux. Mais petit con que j’étais à l’époque, j’avais fait passer ma carrière avant tout le reste. Je n’étais pas le meilleur père qui soit et je ne pensais pas mériter leur pardon, à tous les deux. Même si ses paroles me procuraient une douce chaleur. Nos retrouvailles avaient été, pour moi aussi, un des meilleurs moments de ma vie. Je les avais tant imaginées, jamais de la même façon, et je n’en revenais toujours pas qu’elles s’étaient réalisées. Grâce à un petit con qui m’exaspérait tous les jours. Le Directeur Lestrange avait le don de me mettre hors de moi à chaque fois qu’il ouvrait la bouche, comme son grand con de copain, Londubat. Heureusement, même si Londubat pouvait être des plus rétifs à m’obéir, il avait écouté ma demandé, à sa voir ne plus croiser Lestrange. Et cela me faisait des vacances. Ou presque. Je me suis contenté de l’embrasser sur la tempe en guise de réponse. Je n’avais pas assez de mots pour lui exprimer tout l’amour que je pouvais avoir pour elle. Je n’avais que trois personnes pour qui je risquerais réellement ma vie. Anastasia, Sydney et Nollan. Les trois seuls que j’aimais plus que tout, et pour qui j’étais prêt à tout.


Même enquêter. Ses paroles m’intriguaient. Je sentais bien qu’il y avait un problème. J’ignorais si c’était réellement avec sa meilleure amie, mais mon instinct me disait que oui. J’ai froncé un peu les sourcils quand elle s’est mise à parler. Cela dit, lorsque l’on croisait Londubat dans les couloirs, il pouvait foutre les jetons et pourtant, il n’était pas foncièrement mauvais. Juste un peu trop d’entrain à faire parler les suspects. Mais il avait un bon fond. Enfin… je crois. En revanche, le nom tilta tout de suite à mes oreilles. Et j’admets que cela ne me plaisait guère d’entendre cette identité entre les lèvres de ma fille. Winchester avait un dossier au sein du bureau des aurors. Et ce n’était pas pour ses faits d’armes. Enfin… si. Mais pas dans le bon sens du terme. Cela faisait un moment que mes aurors enquêtaient sur lui. Il tenait une armurerie à Edimbourg, et son nom était apparu lors de l’enquête sur Poudlard. Mais je doutais que lui dire ça pouvait la rassurer. Je la sentais inquiète et j’admets que je ne pouvais que la comprendre. « Pour la surveillance, les aurors savent se faire discret » ai-je lancé. On était quand même formés pour cela. Se mêler dans la foule, sans que personne ne nous voie. Les surveillances n’avaient plus aucun secret pour nous. On en passait des heures tapis dans l’ombre à surveiller, pour avoir tous les renseignements utiles. « Sans enquêter de près sur ce Winchester, je peux savoir si Elena court un danger ou pas, avec lui. » ai-je repris. Si les soupçons s’avéraient exacts, peut-être. Mais rien était prouvé, et ce n’était pas parce que l’on vendait des armes moldues, que l’on était forcément un Chasseur. Ce n’était pas la finalité. « Et je te promets qu’Elena ne le saura pas, mais si cela peut te rassurer… » Bien sûr, je savais que je lui mentirais la prochaine fois qu’elle me parlerait de Winchester. Car même si son destin n’était pas prouvé, les soupçons étaient très forts, assez forts pour qu’il ait retenu notre attention. « Et puis tu sais, moi aussi je peux éliminer les foules en un claquement de doigt, ce n'est pas pour ça que je le ferais » Chasseurs, Mangemorts, Anteawichs, Aurors, Tireurs d’élites, même combat. On était tous des tueurs en puissance. On était juste chacun d’un côté différent de la barrière. Je ne sais pas si cela pouvait la rassurer, j’en doutais. Mais, on m’avait toujours appris qu’il ne fallait pas juger sur l’apparence. « Ne pense plus à lui, je te promets que je ferais tout pour que ton amie ne risque rien. » Le phénix volait au-dessus de nous. Il ressemblait à celui d’Albus Dumbledore, que j’avais vu lorsque je m’étais rendu à Poudlard. « Parle-moi de toi, ma chérie… cela se passe bien avec Nollan ? » Je n’en doutais pas une seule seconde. Nollan, je lui faisais une confiance aveugle pour s’occuper de ma fille. De toute façon, il n’avait pas intérêt à déraper, sinon c’était à moi qu’il aurait à faire. Filleul ou pas.

@Anastasia H. Greene

La question était simple mais tout autant difficile dans sa réponse. Winchester n’était pas un enfant de cœur, si l’on en croyait les soupçons qui pesaient sur lui. Mais l’enquête n’était pas finie – et peut-être que l’on se trompait. Quant à savoir si sa compagne Elena craignait quelque chose, je n’en savais absolument rien mais au fond, je ne le pensais pas. Il lui aurait déjà fait du mal si cela était le cas. Je crois. Et tous les hommes bizarres n’étaient pas des bêtes assoiffées de sang – heureusement d’ailleurs. Sinon la plupart de mes aurors seraient déjà aux arrêts depuis longtemps – bien que certains le méritaient largement, mais ceci était une autre histoire. « Je ne sais pas chérie. » ai-je fini par répondre. « Sûrement que si ce Winchester avait dû lui faire du mal, il l’aurait déjà fait ». Ça, j’en étais quasiment sûr. Mais, pour rassurer ma fille, je ferais en sorte de garder un œil sur Elena et Winchester. Juste pour être sûr.

J’ai émis un petit rire. Il est vrai que mes propos n’étaient pas des plus rassurant, même s’ils étaient parfaitement vrai. Mangemorts, Chasseurs, Aurors, Tireurs d’élite… cela revenait au même. On pouvait tuer n’importe qui, n’importe quand. Notre apprentissage était ainsi. La seule différence entre les aurors et les mangemorts, c’est que nous, les aurors, avions un diplôme. J’ai posé ma main sur la sienne, sentant son malaise. Pourtant, elle m’avait déjà vu en action – même si j’admets que j’aurais préféré que non – elle savait de quoi j’étais capable, comme ceux d’en face, d’ailleurs. J’ai chassé la soirée de mon esprit. Et même si je regrettais qu’Anastasia l’ait vécu, j’étais heureux d’avoir été présent, pour la rassurer autant que je pouvais. La personne la plus douce que je connaissais n’était pas prête pour subir ce genre de situation. Ana pensait aux autres avant de penser à elle, la violence ne faisait pas partie de son vocabulaire et ça me faisait mal de savoir qu’elle avait pu voir l’horreur humaine en action. Quand je voyais ce genre d’attaque, je perdais un peu foi en l’humanité. Je l’admets. Mais quand je voyais ma fille, je me disais qu’elle n’était pas si perdue que ça, cette humanité. Qu’il y avait quand même quelque chose à en tirer. Je lui embrassé le dos de sa main, silencieux. L’enquête sur Winchester était déjà ouverte, cela ne changerait rien pour le bureau des aurors, et puis si cela pouvait rassurer ma fille, de savoir qu’Elena ne risquait rien, moi ça m’allait. Mais au fond, je savais qu’il ne la toucherait pas. Et j’étais bien placé pour savoir que ce n’était pas que derrière les gros bourrus pas classe que se planquaient les Chasseurs et les Mangemorts. Certains cachaient très bien leur jeu.

Nollan avait été mon rayon de soleil depuis qu’il était entré dans ma vie. Être son parrain m’avait rendu plus qu’heureux, et même s’il n’avait jamais comblé l’absence de mes enfants, il m’avait permis de ne pas sombrer totalement. Je l’aimais comme mon fils, même s’il ne l’était pas. J’étais fier de ce qu’il était devenu. Il avait encore beaucoup de choses à apprendre, mais il avait toute ma confiance. Surtout pour s’occuper de ma fille. J’admets que cela me faisait étrange de les savoir ensemble. Mais au fond, cela me faisait plaisir. Cela me rassurait de la savoir avec Nollan. Au moins, avec lui, je savais qu’elle ne risquait aucun danger. Et puis, mon filleul me connaissait suffisamment pour savoir que s’il faisait du mal à ma fille, il aurait à faire à moi. Et cela n’étaient pas des paroles en l’air. On ne touche pas à ma fille. J’ai penché la tête sur le côté à ses paroles. Je ne voulais pas imaginer ce qui pouvait la rendre distante envers Nollan. Même si je n’en avais pas la confirmation, j’en avais une petite idée. Et je le déplorais. La soirée avait été violente. L’attaque aux Picses avaient marqué les esprits, et celui de ma fille encore plus. Je le voyais bien qu’elle n’était plus aussi joyeuse qu’avant. Quelque chose s’était cassée en elle depuis cette soirée. « Tu veux m’en parler ? » lui ai-je demandé, même si au fond, je n’étais pas sûr qu’elle accepte réellement de se confier. Cela ne faisait pas si longtemps que nous nous étions retrouvés, et même si la relation entre nous était bien plus facile qu’avec son frère, elle était en droit de ne pas vouloir se confier sur quelque chose d’aussi important que sa vie amoureuse, et ce qu’elle ressentait depuis l’attaque du Picses. C’était quand même son lieu de travail, son patron était dans un sale état et le pronostic n’était pas très encourageant pour lui.

@Anastasia H. Greene

C’était difficile de faire la part des choses. Entre les attaques et le reste, la généralisation était vite faite. Malheureusement, un seul petit groupe pouvait faire bien plus de dégâts que tous les autres réunis. C’est ce qu’il se passait avec les mangemorts et les chasseurs. Malheureusement, les tensions aux seins de deux mondes se faisaient ressentir – même chez les moldus qui ne connaissait pas le monde magique, et encore plus pour ceux qui le connaissaient. Je ne sais pas où cela allait nous mener, mais j’avais sacrément peur de l’avenir. Si les deux côtés explosaient réellement, on était vraiment mal partis, et je doutais fortement que les deux mondes s’en relèvent. Mais je pouvais comprendre la colère de l’amie de ma fille. Elle avait vu son bar, ses proches se faire attaquer, elle ne pouvait en vouloir qu’aux sorciers – même s’il ne s’agissait qu’un petit groupe. Et pour tout dire, j’aurais pu en vouloir à tous les moldus lorsque Poudlard avait été attaqué, cela ne faisait aucun doute. « Il n’y a que le temps pour ça » C’était si simple à dire et si vrai. Seul le temps pouvait permettre aux esprits de se raisonner, et de ne pas mettre tout le monde dans le même panier.

Je ne pouvais rien dire de plus, c’était si terrible ce qu’il s’était passé là-bas. Les anteawich avaient frappé vites et forts. Pourtant, on avait tendance à vite oublier que des chasseurs avaient pris au combat… et ils en avaient fait aussi des dégâts ces enfoirés. Ce n’était pas la première fois que je pensais à rendre mon tablier, et l’attaque du Picses ne jouait pas dans les arguments pour rester. Loin de là. Mais je savais aussi que j’avais encore quelque chose à faire au sein du bureau des aurors. Je ne pouvais pas lâchement abandonnés mes aurors, comme ça, sur un coup de tête, juste parce que je ne me sentais ni à la hauteur, ni légitime d’être là. J’avais encore quelque chose à prouver, et je tomberais bien bas si je n’allais pas jusqu’au bout de ce que je pouvais faire dans ce boulot – même s’il me prenait la tête plus d’une fois par jour. J’ignorais si la peine serait moins grande pour les moldus qui avaient subi l’attaque du Picses. Honnêtement, le sortilège de l’Oubliette, je le trouvais barbare et très indigne de ce que nous étions. Je n’aimais pas cette méthode. Le secret magique avait fait son temps, et pour ma part, j’aurais bien voulu qu’il soit levé et que l’on vive chacun en harmonie. Utopie quand tu nous tiens. « Je ne sais pas… on leur enlève des souvenirs, et il n’y a rien de pire que ça… Et peut-être un peu égoïstement, j’aimerais que les moldus ressentent ce que nous avons pu ressentir, nous, lorsque Poudlard s’est fait attaquer… » Moi, j’avais toujours évolué dans les deux mondes, et je prenais ce qui me plaisait indifféremment sans me poser de question, mais pourquoi seuls les sorciers avaient le droit de souffrir des pertes qu’ils avaient subi, et pas les autres ?

Ses paroles me contractèrent l’estomac. Parce que j’avais eu les mêmes pensées, un quart de seconde, les regrettant sur l’instant. Sydney n’y était pour rien dans ce que le Picses avait subi, mais je pouvais parfaitement comprendre les pensées de sa grande sœur. J’ai attrapé ma fille par les épaules. « Et cela t’angoisse d’avoir pensé cela ? » lui ai-je répondu, en la serrant contre moi. J’aurais tellement voulu empêcher cette attaque, que tout cela n’arrive pas. Et parfois, je me demandais sincèrement à quoi on servait. Incapables de prévenir les attaques, on les subissait et on ramassait les morceaux, et pour tout dire, exercer mon métier comme ça, cela ne m’enchantait guère. « Je crois que Sydney s’en veut bien plus que toute la Grande-Bretagne. » J’ignorais si cela pouvait la rassurer sur son frère et sur son implication. Sydney avait fait une erreur, et ce n’était pas le premier, ni le dernier. On ne pouvait plus revenir en arrière, c’était ainsi. Mais même si j’acceptais ce qu’il avait été, Ana avait eu le droit de lui en vouloir. Ses amis avaient été touchés dans cette attaque. Elle ne pouvait pas avoir réaction, même aussi proche de son frère qu’elle pouvait l’être.

@Anastasia H. Greene

Le sortilège « Oubliettes », je ne l’aimais pas. Et je ne l’avais jamais aimé. Qui étions-nous pour édulcorer une vérité ? Enlever une partie de la vérité ? Leurs inculquer d’autres souvenirs ? Aussi douloureux soient-ils, c’étaient mes souvenirs, et je détesterais qu’on me les enlève. Ils m’appartenaient. « Et la blessure profonde est-elle une raison pour leur enlever ? Ou leur édulcorer la vérité ? » ai-je renchéri. Je trouvais cela malhonnête. Je n’aimais pas l’idée que l’on puisse jouer avec les souvenirs des gens même si cela leur procurait des cauchemars. Son recul m’a surpris, étrangement je sentais qu’il y avait autre chose que l’attaque du Picses. Je ne la connaissais pas suffisamment pour l’affirmer mais y’avait quelque chose d’étrange dans sa façon d’être. J’ignorais beaucoup de choses de ce qu’elle avait pu vivre lorsque sa mère l’avait mise à la porte, et je crois qu’au fond, je préférais ne rien savoir, ou peut-être que si. Même si je ne pourrais rien faire pour qu’elle oublie. J’ai posé ma main sur son épaule. « Ça va, chérie ? » lui ai-je demandé, même si je doutais qu’elle me réponde réellement sur les pensées qui pouvaient la traverser en ce moment.

Ou peut-être était-ce simplement dû à sa réaction face au passé de son petit frère ? Je ne pouvais que comprendre sa réaction, j’avais eu la même. Même si elle avait été éphémère, ça m’avait perturbé qu’il ait pu faire parti des Anteawich. Et pour la culpabilité, j’en avais plus que tous les autres. Si j’avais été plus présent, si j’avais empêché leur mère de me les prendre, j’aurais pu éviter ça. Je ne m’étais pas battu pour eux, et lorsque Stanley et Smith s’en étaient pris à lui, j’avais laissé faire. J’étais bien un Serpentard dans l’âme, lâche. Incapable de protéger les miens. Je lui ai remis une mèche derrière l’oreille. « Tu as tant de sagesse ma fille. » Mais elle avait tant raison. Sydney se sentait suffisamment coupable pour ne pas lui rabâcher encore et encore qu’il eût fait une connerie en rentrant dans le groupe des anteawichs. C’était ainsi. Son passé n’était peut-être pas glorieux mais il était passé. Et il valait mieux se concentrer sur le présent et sur l’avenir. Aujourd’hui, il ne faisait plus parti du groupe, et tout le monde avait le droit à une seconde chance. Ça j’en étais intimement persuadé sinon j’en connaissais qui ne seraient ni directeur de département, ni auror. Ni rien.

Cela me fit sourire de la voir sourire. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas été aussi sincère. Et je ne pouvais être que d’accord avec elle, l’oiseau avait un bleu magnifique sur les ailes. Elena comptait beaucoup pour Ana, j’en étai persuadé. Je me demandais si l’inverse était vrai. Sûrement que oui. Et au fond de moi, j’espérais que ce Winchester – aussi chasseur soit-il - soit vraiment quelqu’un de bien avec la demoiselle Elena. « C’est un Geai Bleu. Il parait qu’ils peuvent imiter le son de l’homme et des autres animaux qu’ils entendent ». Je n’y connaissais pas vraiment grand-chose en animal, ce n’était pas mon domaine de prédilection, mais cet oiseau-là, on en avait plein aux Etats-Unis. Il venait d’Amérique du Nord et avait pas mal coloniser les différents états américains. Alors oui, je le connaissais.

@Anastasia H. Greene

Elle avait sûrement raison, mais je n’étais pas partisan d’enlever les souvenirs à quelqu’un, même si c’était pour l’apaiser. Les souvenirs, fussent-ils heureux ou malheureux, faisaient partis de nous. C’étaient grâce à eux que nous nous construisions et que nous grandissions. Je ne pouvais concevoir d’enlever un morceau de moi, même si ce morceau fusse-t-il le plus douloureux de mon existence. Je suis resté silencieux, me contentant d’observant l’oiseau. C’était une question compliquée à résoudre. Et je doutais que l’on puisse le faire, tous les deux, aujourd’hui. En revanche, il y avait un moyen pour oublier quelques temps les souvenirs que l’on avait. Certes, ils ne disparaissaient pas totalement de notre esprit mais nous étions incapables de se rappeler des détails lorsque l’on avait recours à cette méthode. « Chérie, tu sais ce qu’est une Pensine ? » Ce n’était pas une magie très courante en et pourtant beaucoup de sorciers y avaient recours. Moi le premier. La mienne se trouvait dans mon bureau, au ministère. « Si cela peut t’aider à rendre tes souvenirs moins douloureux… cela ne les fera pas totalement disparaitre, et tu pourrais y avoir accès dès que tu le désires, mais ils ne hanteront plus tes pensées » ai-je repris. Si cela pouvait lui rendre un peu son sourire, je lui offrais avec grand plaisir une Pensine. Je lui donnais même la mienne.

Je n’étais pas sûr que cela soit la vérité, mais je n’allais pas insister. Cela ne servirait à rien de toute façon. Sa réflexion me fit sourire. « Justement, ma fille, justement ». Rien que de faire ce genre de réflexion faisait d’elle quelqu’un de sage. Elle ne voyait que le bon, même dans l’horreur de la situation. J’ai suivi du regard l’oiseau bleu. Il hantait les prairies et les forêts américaines. Il était étonnant d’ailleurs de le voir au Royaume-Uni. J’avais lu beaucoup de choses sur lui quand j’étais petit. Mon grand-oncle Eddy avait énormément de livres. De tous thèmes, toutes origines. Je n’avais pas eu le temps de tous les lire mais la moitié était passée entre mes mains. Même si je m’étais souvent senti seul chez lui, seul gamin à des kilomètres à la ronde, je n’avais pas été malheureux. J’y avais appris à cuisiner, à faire le ménage, lire, écrire, et il avait toujours des histoires extraordinaires. J’ignorais si elles étaient vraies ou non, mais grâce à lui j’avais appris tellement de choses sur le monde.

J’ai suivi ma fille jusqu’à l’enclos suivant. J’ignorais quel animal il y avait à l’intérieur, mais il avait une crinière. Elle se voyait au loin. « Ce n’est pas une légende. Le geai bleu est très courant aux Etats-Unis, je l’ai déjà entendu faire » C’en était un peu déroutant des les entendre chanter d’ailleurs. Ils avaient réellement la voix de celui ou celle qu’ils imitaient. Je n’avais jamais vu du Zouwu, celui-là – même un peu maigre – m’impressionnait légèrement. J’ai sursauté quand il a poussé un cri, la main tendue vers Ana, de peur qu’elle s’en approche de trop. Dire que j’étais rassuré, j’en doutais, même si je n’en étais pas effrayé. « C’est la première fois que je vois cet animal… je n’arrive pas à déterminer s’il me fait flipper ou non ». Parait que les aurors, ils ont peur de rien. Ça reste à voir, ça.

@Anastasia H. Greene

Honnêtement, je ne savais pas quoi faire pour l’aider à surmonter ce qu’il s’était passé. C’était quelque chose pour lequel, je ne pouvais, en réalité, pas faire grand-chose. Tant que les mangemorts, les chasseurs, les anteawichs étaient sur le territoire, des attentats, des agressions, des morts, des victimes continueraient à se faire. Et les premiers à trinquer étaient les personnes comme ma fille, qui ne voulaient simplement que vivre leur vie tranquillement. Moi, j’avais l’habitude, j’étais dedans depuis plus de vingt ans, je m’étais habitué. Même si j’étais touché parce qu’il s’était passé à Poudlard, au Chemin de Traverse, à Pré-au-Lard, au Picses, je ne voyais ça que par les yeux de l’auror que j’étais. Et aider ma fille s’avérait bien plus compliqué.


La Pensine pouvait être une alternative. Certes, elle n’enlevait pas les souvenirs mais elle les rendait bien plus flou, moins présents dans son esprit. Je m’en servais souvent, pour ne pas être submergé par tout ce qui me passait par la tête. J’en avais vécu des choses, que parfois, me sortir un peu d’horreur de l’esprit me faisait le plus grand bien. J’ai passé ma main sa nuque dans un geste tendre. « Non, je te l’accorde mais cela te permet des les avoir moins présents… et ce n’est pas si mal, non ? » lui ai-je dis d’une voix douce « Rien ne t’empêche d’essayer » lui ai-je répondu. Je ne la forcerais pas à se servir d’une Pensine si elle n’en avait pas envie, mais peut-être que cela lui ferait du bien. J’étais triste de ne pas pouvoir l’aider comme elle voudrait. Il y avait tant de choses que j’aimerais refaire, oublier, revenir en arrière. Mais aurais-je réussi à les protéger tous les deux de ce qu’il se passait dans le pays ? Même si je savais que cela ne servait d’avoir des regrets, que l’on ne pouvait pas revenir sur ce qu’il s’était passé, je ne pouvais pas m’empêcher de penser que tout serait différent si j’avais agi autrement lorsque l’on s’était séparés avec leur mère. On serait toujours aux Etats-Unis, pour commencer, et tout ça, il ne l’aurait pas vécu.

On serait peut-être entrain d’observer les Geais qui se trouvaient aux Etats-Unis, dans une tente au milieu du Montana. Ça me fit sourire, rien que de penser à cette idée. Il y avait tant de choses que j’aurais aimé faire avec mes enfants. « On ira les voir dans le Montana si tu veux » lui ai-je lancé. Après tout, c’était là-bas que je les avais entendus. C’est vrai que c’était très déroutant, et assez inimaginable si l’on ne les entendait pas, réellement. Les Zuwu, j’connaissais pas de trop. J’étais pas le plus calé en bestioles. Je les aimais bien mais je ne m’y intéressais pas plus que ça. J’avais déjà Anatole, cela me suffisait largement. Mais, en observant le Zuwu, je n’arrivais pas à déterminer s’il me fascinait totalement, ou s’il me faisait un peu peur. Mais, c’était une bête impressionnante, même blessée. « Les Zuwu font partis des espèces que l’on braconne pour le marché noir… » C’était peut-être la seule chose que je savais d’eux. « Peut-être une mauvaise rencontre avec la mauvaise personne… » ai-je repris. J’ai eu un sourire franc à ses paroles. J’étais content que la balade lui plaise. Même si je ne pouvais pas lui remonter le moral, comme j’aimerais, cela me faisait plaisir de la voir, un peu sourire. Même si ce n’était qu’un instant éphémère. C’était déjà ça. J’ai fini par passer mon bras par-dessus de son épaule. « Je suis ravi que cela te plaise, ma chérie » ai-je murmuré à son oreille, en l’embrassant sur le haut de sa tête. J’crois que je pouvais rester là pendant des heures, juste à profiter de ma fille, et des animaux, loin de ce qu’il se passait dans les rues de Londres.

@Anastasia H. Greene