When someone won't let you in, eventually you stop knocking ♦ Emlas

Ça fait une semaine mais c'est toujours aussi difficile de réaliser ce qu'il s'est passé. Poudlard a explosé, Poudlard a été la proie des flammes et de la destruction, Poudlard a été pris d'assaut par des armes à feu... Si l'idée a tout du cauchemar, elle est pourtant bien réelle et Emma y a été confrontée comme tous ses camarades de Poudlard en ce lundi 2 juin 1980. L'horreur est venue frapper les portes du château sans épargner personne : élèves comme professeurs ont vu l'établissement s'effondrer petit à petit à petit, ont hurlé de terreur, ont été blessés par les pierres du célèbre château qui se détachaient du toit et des murs. Certains ont perdu la vie ce jour-là, leur image marquant les esprits des survivants. Dont celui d'Emma. Elle les revoit encore. Elle les voit tous les soirs lorsqu'elle ferme les yeux. Elle cauchemarde toutes les nuits sans exception depuis une semaine.

Arpentant les couloirs de l'hôpital à la recherche du numéro de chambre que lui a indiqué le monsieur de l'accueil, la Poufsouffle lève un regard un peu nerveux vers Elias. « Tu te sens bien ? » Il l'observe un instant, arborant un sourire rassurant. « Oui oui, » assure-t-elle avec un petit hochement de tête. Elle esquisse à son tour un sourire pour appuyer ses propos, et ce malgré son stress évident. L'éducateur a accepté de l'accompagner même s'il n'en a pas l'obligation car la jeune fille est majeure désormais. La vérité, c'est que retourner à l'hôpital est toujours une source d'angoisse pour elle, même si ça va faire deux ans qu'elle n'y est plus retourné à cause de son père. Mais aujourd'hui, elle y va pour voir un ami, alors ce n'est pas pareil. Comme de nombreux autres élèves de Poudlard, Nicholas a été blessé durant l'attaque de Poudlard et Emma a appris par sa jumelle qu'il était à Sainte-Mangouste. Elle a donc décidé de lui rendre une petite visite, espérant lui apporter un peu de soutien, aussi infime soit-il.

Arrivée devant la porte de la chambre, elle remercie Elias puis lui demande s'il veut bien l'attendre ici. Trois coups à la porte, elle laisse s'écouler quelques secondes puis ouvre la porte. Au milieu de ces murs si blancs, dans le lit, le Serpentard est allongé et a une mine bien triste. Le voir comme ça lui fait de la peine, mais elle parvient à faire deux pas à l'intérieur pour que Nicholas puisse la voir. « Sa-Salut. » Elle a la voix qui tremble un peu car la vue de son ami dans un tel état la trouble. Elle est inquiète, Emma, terriblement inquiète. Certes, elle n'est pas aussi proche de lui que d'Ophelia, mais elle tient à lui aussi. Même si Liam est le premier à râler à ce sujet, comme s'il considérait Nicholas comme une menace – à tort, selon la Poufsouffle. « Je voulais te voir et... être sûre que tu vas bien. » Elle esquisse un sourire maladroit, mélange de douceur et d'inquiétude qu'elle a du mal à dissimuler.

Devant la porte de la chambre d'hôpital du jumeau Moore, Emma hésite un instant. Il y a l'anxiété liée au lieu, bien sûr, mais il y a aussi autre chose. Il y a cette appréhension de ne pas savoir dans quel état elle va trouver Nicholas lorsqu'elle entrera. C'est par sa jumelle qu'elle a appris qu'il était là, mais elle ne sait pas à quel point il a été blessé. Elle espère du plus profond de son cœur qu'il va bien, mais au vu des horreurs qui sont arrivés le jour de l'attaque... Elle craint le pire. Tant d'un point de vue physique que moral. Et s'il va mal, comment elle va pouvoir le réconforter ? En sera-t-elle même capable ? Elle espère.

Après une profonde inspiration, la blonde pousse tout de même la porte de la chambre. Elle fait quelques pas à l'intérieur pour croiser le regard de Nicholas, qu'elle salue avec un léger tremblement dans la voix. Bien sûr qu'elle a mal de le voir comme ça. Elle esquisse un faible sourire en réponse à celui du jeune homme lorsqu'il lui fait un geste de la main. Elle l'observe se redresser sans dire un mot, espérant que ça ne lui fasse pas mal de bouger – sinon elle préfère qu'il ne fasse pas un effort idiot et douloureux pour elle. « Salut Emma.» Elle aimerait se dire qu'il a l'air d'aller bien, mais elle se mentirait à elle-même. Il a l'air fatigué, et elle se doute que ce n'est pas que ça. Elle se doute qu'il y a plus, caché sous ses boucles brunes et son visage amoché. Mais elle n'ose pas lui poser la question directement, préférant lui signaler simplement pourquoi elle est venue. Ça revient au même, non ? Elle ne veut simplement pas se montrer intrusive. Elle comprendrait s'il ne voulait pas lui parler de ce qu'il se passe dans la tête. « Merci. Mais … je crois que j’ai connu mieux. » Elle s'en doute oui. C'est exactement pour ça qu'elle est là, avec ce maigre espoir de pouvoir l'aider. Lui apporter son soutien, même si cela n'aura sans doute rien de miraculeux pour le jeune homme. Ça lui tenait à cœur, à la Poufsouffle, d'être présente pour le frère de sa meilleure amie qu'elle considère aussi comme un ami. Elle a bien conscience de ne pas être la personne qu'il voudrait voir le plus ici, laissant humblement sa place à sa petite-amie, mais elle voulait quand même être là. Peut-être que c'est idiot et que ça ne servira à rien, mais elle aura au moins essayer. Sa culpabilité dévorante depuis sept longues journées et sept nuits cauchemardesques n'est plus à ça près, de toute façon. « Et … toi ? Tu … te sens bien ? » « Hm hm, » confirme-t-elle en hochant la tête. « J'ai eu de la chance, je n'ai pas été trop blessée. » Il y a bien cette vilaine plaie qui s'est rouverte à cause d'un caillou qui lui est tombé dessus, mais rien d'aussi dramatique que Nicholas, ou bien d'autres camarades qu'elle a vu ce jour-là. Des gosses et des adolescents qu'elle aurait voulu aider mieux que ce qu'elle a fait. Qu'importe qu'Alma lui ait répété qu'elle n'avait rien à se reprocher et que ce n'était pas sa faute, la jeune Poufsouffle s'en veut toujours autant pour ce qu'il s'est passé. Et ça fait une semaine qu'elle y repense sans cesse, noyant par conséquent son esprit dans un besoin irrépressible de tout faire pour aider tout le monde au pensionnat et ainsi ne pas penser. Jusqu'à ce que la nuit vienne, accompagnée des insomnies et des cauchemars qui lui collent malheureusement à la peau. « C'est Ophelia qui m'a dit que tu étais là. Elle s'est dit que... ça te ferait peut-être du bien de voir du monde. » Elle n'a pas la prétention d'être une personne bien intéressante, mais elle s'est dit que voir des têtes connues lui ferait du bien... Pourtant au fond elle sait que ce n'est pas elle qu'il souhaite voir.

Après une longue hésitation durant laquelle la blonde mord avec acharnement sa lèvre inférieure, elle joint ses mains dans son dos pour jouer avec ses doigts sans qu'il la voie et reprend la parole. Dans sa voix demeure un léger tremblement, non pas parce qu'elle ne croit pas en ce qu'elle dit mais parce qu'elle ne sait pas si ce qu'elle va faire est bien – quand bien même ses intentions le sont. « Je-Je sais que ce que tu traverses est difficile mais... Tu es vivant, et Ophelia aussi... C'est une chance. » Une chance que tout le monde n'a pas eu dans le château, malheureusement. « Et je suis sûre que le Ministère fait tout ce qu'ils peut pour retrouver Lysea... Et qu'ils vont la retrouver. » Tous ces gens qui travaillent au Ministère, ce sont des professionnels, alors ils vont forcément y arriver. Et la septième année rentrera saine et sauve auprès de celui qui l'aime – la jeune Poufsouffle ne peut pas croire que les choses pourraient se passer autrement. « Et je voulais te dire que... Si tu as besoin de parler à quelqu'un, je suis là. Ou si tu préfères que je parte, je peux aussi partir. » Emma ne s'imposera pas quelque part où elle n'est pas désirée, c'est certain.

À peine a-t-elle ouvert la porte qu'Emma se demande si elle n'aurait pas dû faire demi-tour et retourner auprès d'Elias pour rentrer à l'orphelinat. Elle n'est sans doute pas la personne la plus adaptée pour essayer de réconforter Nicholas. Sa sœur, sa jumelle, serait sans doute bien mieux placée pour cela. Plus au fait de ce qu'il ressent, de ce qu'il éprouve, de ce dont il a besoin, puisqu'ils partagent un lien qu'elle ne peut qu'imaginer. Elle, elle n'est qu'une camarade de classe à ses yeux. Et si elle a un attachement certain pour le jeune homme, dû à sa proximité avec Ophelia qui est une de ses meilleures amies, elle est loin d'être aussi proche de lui que l'est cette dernière ou que peuvent l'être les autres membres de sa famille. Qui plus est, il a sans doute bien d'autres amis à Poudlard qui seraient plus à même de lui venir en aide qu'elle. C'est pour ça qu'elle a longtemps hésité à venir. Elle souhaitait lui apporter elle-même un peu de soutien et de réconfort, lui rappeler qu'elle peut être une oreille attentive s'il a besoin de parler... Mais une fois devant la porte, les doutes se sont emparées d'elle à nouveau. Et si après une grande inspiration elle est parvenue à les chasser, voir la triste mine de Nicholas les font réapparaître en un claquement de doigts. Est-elle vraiment capable de l'aider à aller mieux ? Elle l'espère sincèrement, prenant précautionneusement de ses nouvelles tout en craignant de manquer de délicatesse à propos de ce qu'il s'est passé. Elle peine à dissimuler sa propre inquiétude tant son visage fatigué tranche avec son air confiant habituel. Le Nicholas qu'elle a connu à Poudlard est si différent de celui qu'elle a sous les yeux : son regard est plus terne, ses traits tirés, son dos courbé dans ce lit d'hôpital dans lequel il semble minuscule. Il n'a plus sa prestance habituelle, celle du fier Serpentard qu'il est. Il est celui qui a connu mieux, et même si elle s'y attendait, Emma est forcément préoccupée par ce qu'elle voit.

Elle, elle va bien. Elle l'affirme sans mal parce qu'elle minimise sans cesse ses blessures, physiques comme psychologiques. Sa plaie qui s'est rouverte à cause d'un mauvais coup dans le dos n'a pas la moindre importance à côté des horreurs auxquelles ils ont assisté il y a une semaine. « Je suis heureux que tu n'aies rien Emma. » Elle répond timidement au sourire qu'il lui offre, souhaitant avoir l'air rassurante malgré l'inquiétude qui lui tord les tripes à le voir ainsi. Elle a eu des nouvelles de lui par sa jumelle, ne voyant pas l'intérêt de cacher cette information au principal concerné. Ophelia lui a dit que son frère aurait sans doute besoin de voir du monde, alors elle a sans mal accepté de jouer ce rôle. Elle tient assez aux jumeaux Moore pour s'infliger le calvaire d'entrer dans un hôpital. « Ophelia ? Et, elle, comment elle va ? » La blonde hoche doucement la tête. « Elle va bien. Elle s'inquiète pour toi. » Comme elle le fait toujours, à vrai dire. Mais après un incident d'une telle ampleur, comment ne pas s'en faire pour son jumeau blessé dont la petite-amie a été enlevée ?

Emma ne peut qu'imaginer la peine et la douleur qu'il ressent, n'osant se figurer à sa place s'il était arrivé malheur à Liam durant l'attentat. Elle compatit mais essaie de lui faire voir l'aspect positif de cette situation, aussi maigre qu'il puisse sembler pour Nicholas. Il est vivant, sa jumelle aussi, et le Ministère est à la recherche de Lysea. Ce sont des gens compétents qui travaillent là-bas, alors elle ne doute pas qu'ils vont la retrouver. « Je sais qu'on est vivants, tous les deux. Et toi aussi. Et, j'en suis plus que conscient mais ... comment être heureux alors que ... nos amis ne sont plus avec nous ? » La jeune fille baisse les yeux, les images de Poudlard en ruines lui revenant sans délicatesse à l'esprit. Elle revoit les pierres, la fumée, les corps. Elle revoit leurs amis qui ne se relèveront jamais. « Pourquoi, j'ai survécu ? Pourquoi moi ? Et, même si je sais que le Ministère mettra tout en œuvre pour retrouver Lysea, j'ai peur Emma. Peur pour elle ... peur de savoir ce qui lui est arrivé ... » L'adolescente déglutit douloureusement, laissant un silence planner, avant de parler à nouveau. « Je sais que tu as peur, c'est normal... Mais il faut que tu gardes espoir. Je ne la connaissais pas beaucoup mais ça avait l'air d'être une battante, je suis sûre qu'elle va revenir. » Ils vont la retrouver, elle ne peut pas imaginer les choses autrement. Mais là tout de suite, debout aux pieds de son lit, elle se sent forcément inutile de n'être que des belles paroles, quand bien même elle fasse de son mieux pour aider Nicholas. Elle se propose comme oreille attentive ou présence réconfortante, à défaut de pouvoir faire bien mieux du haut de ses dix-sept ans. « J'ai besoin de parler à quelqu'un. Je ne veux pas parler à ma famille, parce que ça m'est impossible. Mais ... reste. S'il te plait ... » Elle hoche la tête. « Je reste, ne t'inquiète pas. » lui assure-t-elle d'une voix douce. Si c'est ce qu'il souhaite, alors bien sûr qu'elle va rester. C'est le moins qu'elle puisse faire, surtout qu'elle le lui a proposé. Elle fait finalement un pas vers la tête de son lit, attrapant une chaise qu'elle tire vers elle pour pouvoir s'asseoir à ses côtés. Elle essaie de capter son regard mais il fixe ses draps d'un blanc si caractéristiques de l'hôpital. Un blanc qu'Emma déteste car il lui rappelle de douloureux souvenirs, mais elle garde en tête qu'elle est là pour lui et non pour s'apitoyer – ça n'a jamais été son genre, en réalité. « Tu peux me parler de tout ce que tu veux. De ce qu'il s'est passé... ce jour-là. Ou bien de votre rencontre, de vos plus beaux moments... Ou n'importe quoi. Ce dont tu as envie de parler, ce qui te ferait le plus de bien. » Elle veut lui être utile, lui donner l'impression qu'il n'est pas seul et que quelqu'un l'écoute et le comprend. Elle espère en être capable, avoir les épaules assez solides pour le supporter. Elle ne peut pas s'effondrer alors qu'il a besoin d'aide.