Ce fut d’abord comme un écho, dans ma tête. Une litanie au fond de mon esprit.
Une pensée parasite, qui s’imposait de plus en plus… jusqu’à me dissuader de fermer l’oeil, cette nuit-là.
Deux jours plus tôt, j’avais appris la nouvelle. Celle d’un ennemi capturé, d’un de ces fameux membres de ce qui se faisait appeler “L’Ordre du Phoenix”, et qui s’était donné comme credo d’affronter les partisans du Lord en contournant la loi. Tout autant que les mangemorts, aux yeux du Ministère ils étaient également des criminels.
Celui-ci, c’était un de ces monstres de loup-garou qui l’avait ramené. Sköll. Un traqueur hors pair, je ne pouvais que l’admettre, mais une créature aux instincts primaires et violents qui ne m’inspiraient aucune confiance. Comme tant d’autres, il n’était là que par l’appât du gain. Or, celui qu’il avait ramené était l’un de son espèce, ce que je trouvais assez curieux, n’imaginant pas une créature de nature cruelle à rejoindre ceux qui prétendaient “défendre le bien”. J’avais en outre connaissance que le Greyback avait tenu à ramener une moldue en guise d’amuse-bouche, qu’il avait mis dans la cellule du captif lors de la lune ronde. Cette simple pensée, même s’il s’agissait d’une sous-race à éradiquer, me dégoûtait. Et pourtant… j’avais à ce moment été à des lieues de ce que j’ai pu ressentir en apprenant l’identité de notre invité.
Remus. Remus Lupin.
Oh que j’avais dû prendre sur moi, lorsque ce nom me fut révélé, alors que je fus prise par un mélange de désarroi, de répulsion et de colère. Lui… un loup-garou ? Depuis combien de temps ? Sirius était-il seulement au courant ? J’avais du mal à croire que ça ne soit pas le cas.
Or, cette information n’avait eu de cesse à me travailler, alors que j’étais de retour chez moi. Et les deux jours qui suivirent furent gâchées de réflexions me rendant tout simplement improductive. Je savais que ces deux-là ne se parlaient plus depuis l’événement de l’hôpital, mais pouvais-je décemment fermer les yeux sur leurs années d’amitié, et ignorer que, là-bas, l’équivalent d’un frère de celui qui était le plus cher à mon coeur se faisait torturer ?
Cette nuit-là, je fus incapable de fermer l’oeil. Consciente que mes songes seraient probablement ponctués de cauchemars dont Elle se délecterait. Or, je me refusais de lui offrir cette possibilité supplémentaire de m’atteindre. Et au petit jour, allant à l'encontre de mes principes et mes accointances, ma décision était prise. Car je ne pourrais sans doute plus regarder Sirius dans les yeux, si je savais son ami mort dans de telles circonstances. Et la mort, c’était bien ce qui l’attendait, s’il ne parvenait à s’enfuir.
Vêtue d’une lourde cape sombre, je traversais les couloirs de la demeure nous servant de repère, jusqu’à arriver dans les sous-sols de cette dernière. Là se tenait un autre mangemort, qui gardait les lieux.
« A-t-il parlé ? » demandais-je simplement.
« Toujours pas. » rétorqua-t-il d’un ton bourru, laissant percevoir son agacement quant à la situation.
J’hochai alors la tête, face à cette situation qui m’arrangeait quelque peu vis à vis de ce que j’avais élaboré.
« Laissez-moi tenter. Rodolphus m’avait formé à la légilimancie, j’en tirerai peut-être quelque chose. » Le simple fait d’évoquer le nom du Lestrange arracha un grognement à mon interlocuteur, mais eut l’effet escompté. Rodolphus était connu pour ses talents, alors il n’était nullement question de remettre en cause son enseignement. Aussi s’écarta-t-il.
Je plaçai alors un masque d’argent finement ciselé sur mes traits, la capuche masquant ma chevelure, sans pour autant me leurrer sur le fait que le captif allait rapidement reconnaitre mon identité, ne serait-ce qu’à ma voix. Le but était uniquement de donner le change pour celui qui m’avait ouvert la voie.
Lorsque j’ouvris la porte dans un grincement, ce fut d’abord la puanteur des lieux qui m’arracha un haut-le-cœur, avant que je ne discerne la silhouette tassée dans la pénombre. D’un mouvement de baguette, je fis voleter une petite orbe de lumière diaphane dans la pièce, avant de refermer derrière moi.
« Te voila dans un bien triste état, Lupin… »