Trahison, disgrâce ♦ Lunea

Les mains dans les poches, l'air renfrogné, Luna descend les marches de l'escalier en maugréant presque. La lettre qu'elle a reçue au petit-déjeuner a fini de casser son moral déjà bien rongé par sa présence ici. Poudlard, elle ne voulait pas y aller. Elle l'a dit à sa mère, tout un tas de fois, mais cette dernière n'a rien voulu entendre. Les cris de la fillette n'y ont rien changé : Luna a onze ans, elle n'a pas son mot à dire sur l'école qu'elle va rejoindre. Encore moins si elle a l'idée complètement stupide de vouloir étudier dans le monde moldu. D'ailleurs, Deborah ne s'est pas gênée pour éclater d'un rire mauvais lorsque sa fille lui a parlé de son envie à elle. Elle est la méchanceté incarnée, la gamine en est sûre maintenant. Elle est toujours affreuse avec elle, elle la regarde mal, elle ne l'écoute même pas quand elle parle. Et aujourd'hui, elle lui a envoyé une lettre pour la rabaisser au sujet de la maison qu'elle a intégrée à son arrivée à Poudlard : Serpentard.

Luna ne sait même pas comment sa mère l'a su. Elle doit avoir des amis dans l'établissement, qui l'ont reconnue et lui ont rapporté l'issue de la cérémonie de répartition. Comme si Luna avait choisi d'atterrir chez les verts et argents ! Elle n'a rien demandé, elle, c'est juste ce chapeau bizarre qui l'a décidé. Et ça ne choque personne, dans cet établissement, que ce soit un couvre-chef doué de paroles qui répartisse les élèves à la rentrée. La fillette n'a pas du tout apprécié d'entendre ce truc parler lorsqu'il était posé sur sa tête. Elle ne sait même pas si tout le monde pouvait l'entendre ou si elle l'était la seule à supporter ses blablas. Y repenser fait remonter un frisson le long du dos de la gamine. Elle a hâte de s'enfermer dans sa chambre pour être seule, même si elle sait que sa tranquillité prendra fin lorsqu'elle devra assister au cours suivant. Mais deux heures en solitaire, l'idée lui plaît. Elle pourra écrire à son père.

Elle ne sait pas combien d'étages il lui reste à descendre pour arriver à son dortoir. Elle a l'impression qu'elle a déjà englouti une infinité de marches sous ses pieds, mais ça n'en finit pas. Décidant de prendre une pause parce que ces saletés d'escaliers lui foutent le tournis en bougeant sans aucune raison, elle s'arrête à l'étage suivant et peste en silence. Pourquoi il faut absolument que tout soit ensorcelé chez les sorciers ? Ils ne peuvent pas s'empêcher de transformer le moindre objet en un danger possiblement mortel ? Il faut croire que non. Et si leur chapeau à la noix croquait les oreilles des gens ? Nouveau frisson pour la fillette lorsque son esprit fait apparaître des dents monstrueuses sur le souvenir qu'elle a du vieux machin rabougri. Elle relève la tête pour se sortir cette image de la tête, et croise deux iris clairs qui la figent soudainement. Aelys ? Non, Aelys est à Londres, dans une école qu'elle a même montré à Luna. Alors ça ne peut être que... « Lysea ? » En se rapprochant de celle qu'elle a pris pour son amie d'enfance, la brune n'a plus aucun doute pour son identité. Elle l'a vue bien trop souvent durant son enfance pour se tromper, elle est quasi certaine que c'est bien à Lysea qu'elle a affaire et non à sa sœur. « Qu'est-ce que tu fais là ? » Elle n'arrive pas à y croire. Ça fait deux ans qu'elle ne voit cette jumelle-ci que pendant les vacances, à cause de ses études. Ses études ? « C'est ça ton pensionnat écossais ? » L'esprit de la jeune fille cogite follement, peinant à accepter toutes les explications qui lui viennent et toutes les émotions qui la traversent.

Luna ne voulait pas aller à Poudlard. L'enseignement de la magie la dégoute évidemment, mais en plus de ça elle y est frappée de plein fouet par la solitude. Certes, la jeune fille n'est pas la plus sociable qui soit, mais ici elle se retrouve absolument toute seule. La Williams a grandi dans le monde moldu, avec pour seule sorcière dans son entourage une meurtrière – sa mère. Tous ses amis de l'école sont moldus, et ils sont tous rentrés dans un collège normal où elle aurait aimé aussi aller. Alors à Poudlard, elle ne connaît personne : tous ces sorciers sont des inconnus possiblement dangereux. Sauf cette rousse qu'elle croit reconnaître dans un couloir, et dont elle s'approche jusqu'à être sûre de qui lui fait face. C'est bien une des jumelles Walsh, et plus précisément Lysea puisque Luna sait exactement où étudie sa sœur. Réaliser que son amie d'enfance étudie à Poudlard est difficile à assimiler, si bien que la jeune fille affiche une mine bien peu joyeuse pour des retrouvailles. « Hey salut Luna ! Je t’ai vue à la répartition hier ! Mais tu es partie si vite, j’ai pas eu le temps de venir te voir ! » Partagée entre l'incompréhension et la déception, elle fixe son aînée sans pouvoir répondre à son enthousiasme. « J’ai vu que tu étais chez les Serpentard ! J’aurais préféré que tu sois avec nous parce que Godric Gryffondor était le plus valeureux des fondateurs de l’école, mais bon, Serpentard c’est bien aussi ! T’es contente d’être ici ? Tu vas voir, l’apprentissage de la magie c’est génial ! » Au contraire, Lysea est un vrai moulin à paroles qui la noie sous les mots à un rythme soutenu, ce que la plus jeune a du mal à comprendre. C'est tout ce qu'elle a à lui dire ? Vanter un sorcier dont Luna se fout complètement et des cours auxquels elle n'a pas envie d'assister, plutôt que se justifier de lui avoir menti pendant deux ans ? « Euh... Oui... Hm... » La petite nouvelle ne sait pas quoi dire, en réalité elle se moque pas mal de ce que lui raconte Lysea sur cette école. Elle ne voulait pas y aller, de toute façon. Elle n'a pas besoin qu'on lui vante Poudlard, ça ne la fera pas changer d'envie. Ce dont elle a besoin, par contre, c'est de clarifier cette situation, d'où la question qu'elle formule sur le mensonge que la Walsh lui a vendu pendant deux ans.

Bien sûr, Luna n'arrive pas à être complètement neutre lorsqu'elle la lui pose. Elle a onze ans, elle n'est pas particulièrement une bonne comédienne et elle ne parvient pas à cacher sa déception. La vérité, c'est que Luna se sent trahie. Depuis qu'elle est petite, elle regarde les jumelles Walsh avec des yeux plein d'étoiles. Elles sont ses aînées mais elles sont surtout ses amies, avec qui elle a grandi et joué tant de fois qu'elle a l'impression de les avoir toujours connues. Et aujourd'hui, elle apprend que Lysea lui a menti pendant deux ans sans se soucier du sentiment d'abandon qu'elle s'était pris de plein fouet. Elle ne lui a pas dit la vérité sur sa nature de sorcière, elle a prétendu que ce n'était qu'un pensionnat écossais qui la maintenait loin de chez elles toute l'année. « Oui, je suis à Poudlard depuis le début... » Ce n'est pas un simple pensionnat, c'est une école de magie. C'est l'endroit où Luna est bloquée contre son gré et qu'elle déteste d'ores et déjà pour cette raison. En face d'elle, la Walsh semble avoir perçu les ressentiments puisqu'elle tente de se justifier. « Je ne pouvais en parler à personne, il n’y a que mes parents et ma soeur qui sont au courant. La loi sorcière nous oblige à cacher notre existence aux Moldus pour des raisons de sécurité. Même quand on est né parmi eux... » Évidemment, Luna surinterprète certains propos de son aînée. Elle parle de sécurité comme si les moldus allaient l'attaquer s'ils savaient la vérité, or la fillette a l'impression qu'elle l'inclue dans cette question de sécurité. C'est blessant, là encore ça se lit dans ses yeux clairs. « Tu pensais que moi je te ferais du mal si je savais ? » Ce qu'elle se dit aussi, c'est que les sorciers ne mentent pas que pour ça. Complètement biaisée par sa propre vision de la magie déjà très négative, elle ne peut pas s'empêcher de penser que s'ils cachent leurs pouvoirs c'est parce qu'ils comptent les utiliser avec de mauvaises raisons. Si les sorciers cachent leurs actes de magie, c'est qu'ils savent que ce qu'ils font est mal, non ? C'est ce qu'a fait sa mère, en tout cas, et c'est la seule référence sorcière qu'avait Luna avant Poudlard. « Ça veut dire que t'as laissé Aelys pour venir ici ? Tu voulais pas rester avec elle ? » qu'elle demande, cette fois-ci moins accusatrice qu'à propos du pensionnat écossais. Les parents Walsh sont gentils, Luna est sûre qu'ils auraient laissé Lysea rester à l'école avec sa jumelle si elle l'avait voulu. Elle a cette chance et elle n'en a pas profité, la Williams ne comprend pas.

Se prendre de plein fouet la vérité sur la nature sorcière d'une de ses plus chères amies, c'est indéniablement douloureux pour Luna. La jeune fille n'a jamais eu beaucoup d'amis, mais elle tient à ceux qu'elle a. Et les jumelles Walsh en font partie : elle a grandi à leur côté et les a pris comme exemples toute son enfance. Puis quand Lysea est partie dans un pensionnat écossais, elle a souffert de l'absence de son amie en dehors des vacances mais se satisfaisait de la voir pendant celles-ci. Elle espérait que ce drôle de choix serait une bonne chose pour la suite de ses études, même si elle ne comprenait pas pourquoi Aelys et elle n'avait pas fait le même choix alors qu'elle les a toujours vues comme inséparables. C'est aujourd'hui que Luna a le droit à une explication de cette séparation, ou plutôt à la vérité. Voilà deux années de mensonges qui volent en éclats à l'instant où elle reconnaît Lysea dans un couloir de Poudlard – un pensionnat écossais mais surtout une école de magie.

Cette découverte est un choc, mais surtout une déception. Elle n'aurait pas cru que son amie serait capable de lui mentir de la sorte. La jeune fille de onze ans a le goût amer de la trahison sur la langue et n'est pas capable de cacher ce qu'elle ressent. Elle ne comprend pas, elle est triste, elle est blessée. Elle n'a pas besoin de le dire pour que Lysea le comprenne : le ton de sa voix et son regard le manifestent à eux seuls. C'est d'autant plus vexant que la Walsh affirme ne pas lui en avoir parler pour des raisons de sécurité. Luna le prend pour une attaque personnelle, comprenant que son amie pensait qu'elle s'en prendrait à elle si elle savait. « Non, bien sûr que non, je sais que tu ne m’aurais pas fait de mal mais… parfois les gens ont beau t’aimer, ils ne comprennent pas quand la magie arrive dans ta vie. En ce moment, Aelys ne veut pas trop me parler à cause de ça, tu vois. Elle croit que ça m’éloigne d’elle alors que ça ne changera rien. C’est ma sœur, je l’aimerai toute ma vie, peu importe l’école dans laquelle on étudie. Et au-delà du fait qu’on n’a pas le droit d’en parler en dehors de la communauté sorcière, j’avais peur que tu aies la même réaction qu’Aelys. » Sans surprise, la brune est d'accord avec Aelys. Bien sûr que la magie les éloigne. C'est ce qui a brisé sa famille, c'est ce qui a transformé mère en monstre, et c'est surtout ce qui a privé Luna de son père. Pourtant, elle se dit qu'elle aurait préféré ça à un tel mensonge. La trahison c'est pire que tout, non ? « Si j'étais pas entrée à Poudlard... Tu me l'aurais jamais dit ? » qu'elle finit par demander, se demandant si Lysea aurait été capable de lui mentir pendant des années encore. Est-ce qu'elle s'est sentie mal de lui mentir chaque fois qu'elle revenait à Londres ?

Pleine de rancœur mais aussi de crainte envers la magie, Luna aurait tout donné pour ne pas entrer à Poudlard. Elle voulait aller dans un collège normal, elle voulait rejoindre Aelys et pas une école de fou. Pourtant elle n'a pas eu le choix : sa mère ne lui a pas laissé le choix. Ce n'est pas le cas de Lysea, elle en est sûre. Du haut de ses onze ans, la fillette est persuadée que ses parents, qu'elle sait gentils et bons, aurait accepté que les jumelles restent ensemble. Elle interprète donc la venue de Lysea dans ce château comme un choix – celui de la magie mais aussi celui d'abandonner sa sœur. « Je… J’avais pas trop le choix, ma place est ici et Aelys n’a pas de pouvoirs magiques. J’ai très mal vécu ma première année parce que je n’ai jamais été séparée de ma sœur avant ça. S’envoyer des lettres, c’était pas assez pour moi, j’avais besoin de la voir tout le temps comme avant. » Luna perçoit l'honnêteté de son amie lorsqu'elle lui dit que sa jumelle lui a manqué, pourtant elle reste certaine que Lysea avait le choix. « Mais tu aurais pu aller au collège avec elle, » assure-t-elle d'une voix convaincue. Ce n'est pas parce qu'elle a des pouvoirs magiques qu'elle n'a pas le droit d'étudier dans une école moldue, si ? Si c'était ce qu'elle avait voulu, ça aurait été possible, la Williams en est persuadée. « J’aurais voulu qu’on ne se quitte jamais mais au fond, je sais bien qu’on n’a pas les mêmes caractères et qu’on n’aurait pas choisi les mêmes écoles même si j’avais été Moldue. On aurait dû faire nos études séparément à un moment ou un autre. » Luna fronce du nez, pas bien convaincue. Peut-être qu'elles auraient suivi des études supérieures une fois grandes, mais au début... Elles seraient allées au même collège et au même lycée, non ? En tout cas, c'est ce que la brune s'imagine.

Luna sait que si elle avait eu le choix, elle n'aurait jamais mis un pied à Poudlard. La magie la terrifie, source de malheur et de violence dans les yeux de la fillette. Avoir sa mère comme seul exemple de sorcière n'a pas aidé à ce qu'elle ait une belle vision de ce prétendu don. Et son entrée à Poudlard n'a pas vraiment arrangé les choses : elle ne connaît personne ici, si ce n'est Lysea qui l'a trahie. Mais cette dernière semble toujours aussi enthousiaste au sujet de cette école, ce que la brune a du mal à comprendre. « Je ne te cache pas qu’au début, tu risques de te sentir nostalgique de ta vie à Londres mais tu vas voir, cette école est géniale et la magie, c’est passionnant ! Et puis Kaelia et moi on sera là si jamais tu as un coup de blues. On se sentira moins seules, toutes les trois. » Comment peut-elle autant aimer ce lieu qui l'a séparée de sa jumelle ? Luna, elle, ne peut pas. Cet endroit est une rupture de plus avec son défunt père, et sa présence même ici lui a été imposée par sa monstrueuse mère... Comment pourrait-elle apprécier être ici, trouver cette école géniale, aimer être forcée à utiliser la magie ? « On utilise la baguette à tous les cours ? » qu'elle demande, et cette fois-ci son ton se fait plus curieux qu'accusateur. « Je trouve ça bizarre, » admet-elle, ce que Lysea interprétera sûrement comme le manque d'habitude d'utiliser un tel objet. Même si elle lui en veut, la Williams a bien conscience qu'elle est pour l'instant la seule personne qu'elle connaît vraiment ici. Elle préfère lui poser des questions à elle qu'au garçon qui était assis à côté d'elle à la table des Serpentards et la regardait comme si elle n'avait rien à faire ici. Ce que Luna ignore, c'est que cet élève était un sang-pur héritier d'une famille réputée dans le monde sorcier, et que s'il la regardait ainsi c'est parce qu'elle n'était pas comme lui. Elle n'a pas encore conscience qu'aux yeux de beaucoup de ses camarades de maison, son absence d'ascendance noble et purement sorcière réduit considérablement sa valeur – pour eux elle n'est personne et n'a pas sa place dans la maison de Salazar. Par contre, ce qu'elle sait, c'est que sa mère aussi était furieuse qu'elle se soit retrouvée affublée d'une cravate verte et argent. Alors la question qui lui vient trahit son incompréhension d'enfant et son inquiétude... « C'est mal, d'être à Serpentard ? » Son regard s'accroche à celui de Lysea, et dans ses yeux elle cherche une réponse honnête – peut-être parce qu'elle craint d'être victime d'un nouveau mensonge.

Du haut de ses onze ans, Luna a bien du mal à comprendre que son aînée ait pu lui mentir de la sorte pendant si longtemps. Un étouffant sentiment d'injustice l'étreint depuis qu'elle a reconnu Lysea à Poudlard. Il y a deux ans, lorsque cette dernière s'est séparée de sa jumelle pour intégrer un autre collège, elle lui a seulement parlé d'un pensionnat écossais. Elle ne lui a jamais parlé de magie, en faisant son vilain petit secret qui vient d'éclater et de créer un immense fossé entre elles. « J’avais peur de ta réaction. Que tu me rejettes comme Aelys. » Comment savoir si elle l'aurait fait puisque Lysea ne lui a rien dit ? « Toi non plus, tu ne nous as jamais dit que tu avais des pouvoirs magiques… » Les yeux de Luna s'arrondissent tels ceux d'une chouette alors que sa lèvre inférieure se met à trembler. En quelques secondes à peine remontent tous les souvenirs de cet été maudit où ses pouvoirs sont apparus et où son père est mort. « J-Je savais pas que j'en avais... ni que je devrai venir ici, » rétorque-t-elle d'une petite voix étranglée, outrée par l'idée que Lysea essaie de retourner tout ça contre elle. C'est à elle qu'on ment, pas l'inverse ! Son monstre de mère, Lysea... Tout le monde lui ment, ça va faire des années que ça dure et ce n'est pas juste. Lorsque son amie est partie pour Poudlard, Luna n'avait que neuf ans et ne savait pas trop comment fonctionnait le collège, alors elle s'était imaginée qu'elle n'avait pas eu le choix. Sinon, pourquoi aurait-elle abandonné Aelys ? Pourquoi serait-elle partie si loin de sa jumelle et de leur maison si ce n'était pas par obligation ? Elle les considérait comme une unité inébranlable, deux moitiés que rien ne pourrait jamais séparer, et voilà qu'elle découvre que Lysea est parfaitement heureuse dans sa tenue rouge et or, au milieu de tous ces sorciers, loin de sa sœur. Et elle a beau prétendre que cette dernière lui manque, Luna a bien du mal à la croire lorsqu'elle a l'air si à l'aise dans cet établissement qui n'a rien à voir avec le monde dans lequel elles ont grandi, si fière de faire partie d'un tout autre monde, ça la déconcerte. « J’ai pas ma place dans les collèges moldus, tout le monde m’aurait traitée de monstre et ma sœur ne m’aurait pas défendue puisqu’elle est de leur avis. Il fallait que j’apprenne à me servir de ma magie pour la contrôler. » « Mais maintenant tu la contrôles non ? Tu pourrais rentrer. » Elle l'affirme comme une suggestion, parce qu'à ses yeux c'est le plus logique à faire. Ça prend tant de temps que ça, de maîtriser la magie ? Ou Lysea ne souhaite-t-elle simplement pas revenir auprès de sa jumelle et du monde qui est le leur ?

Luna, elle aimerait bien pouvoir y retourner. Ne pas être obligée de rester dans cette école qui lui semble si étrange, où certains cours nécessitent une baguette magique comme si tenir un bout de bois dans la main avait le moindre sens. « Non on est pas obligés de s’en servir à chaque fois parce que tu as des cours théoriques comme l’Histoire de la Magie ou l’Astronomie et des cours plus manuels comme la Botanique ou les Potions. On s’en sert qu’en Sortilèges et Métamorphoses, Défense contre les forces du Mal, ce genre de truc. » La brune hoche doucement la tête, son regard trahissant à quel point son cerveau cogite. « Et c'est pas dangereux ? » qu'elle demande, toujours aussi perplexe. Tout ce qui lui arrive lui paraît tellement invraisemblable. Des cours de magie, vraiment ? Ces noms de matières semblent issus d'une fiction, pas de véritables enseignements prodigués dans une école dans laquelle elle met aujourd'hui les pieds. « C’est pas bizarre, c’est juste différent. C’est une habitude à prendre, ça deviendra l’extension de ton bras et de ta magie. On apprend à l’aimer, aussi. Regarde la mienne comme elle est belle ! » Ses yeux se posent sur sa chère baguette mais elle n'y voit qu'un bout de bois. Un bous de bois sculpté, certes, mais un bout de bois quand même. « Oui oui j'ai juste... pas l'habitude, » affirme-t-elle par politesse, surtout parce qu'autre chose de plus important lui trotte dans la tête depuis le petit-déjeuner. Depuis qu'elle a reçu une lettre de sa mère.

Une lettre dont chaque mot tourne en boucle dans son esprit, chaque critique, chaque reproche. Elle semblait tellement furieuse qu'elle soit à Serpentard que Luna en est venue à douter : y a-t-il quelque chose de mal à ça ? « Non bien sûr que non, aucune maison n’est meilleure ou pire que les autres. C’est selon ton caractère et ta façon d’être. Après je peux t’assurer qu’il y a des imbéciles dans chaque maison de Poudlard ! » Les traits de Luna se détendent un peu, comme si la réponse de son aînée l'avait un peu rassurée. « Et ça dit quoi de mon caractère, Serpentard ? » Est-ce que c'est vraiment aussi négatif que l'affirmait cette horrible lettre ? « Je sais que la rentrée ici est impressionnante et que tu ne connais personne pour le moment mais promis tu vas t’y faire ! Tu vas adorer Poudlard, tu verras ! » « Hm... » Elle n'en est pas tout à fait sûre, pour être honnête, mais ça elle préfère ne pas le formuler. « Et n’aies pas peur, les préfets vont vous escorter jusqu’à vos dortoirs, tu ne te perdras pas. » Cette fois, la remarque lui arrache un sourire. « Tant mieux... Ça fait un peu peur, les escaliers qui bougent tout seuls, » assure-t-elle avec une légère grimace.