Let's get out of here ♦ Madex

C'est normal qu'à force de fixer le plafond Maddy y voit des courses d'animaux, comme un hippogriffe rattrapant un lièvre et essayant de lui pincer la queue ? Est-ce que c'est le début de la folie ou simplement la preuve qu'elle s'emmerde comme un rat mort maintenant que les potions ne la font plus comater toute la journée ? Sûrement la seconde option, et la joueuse de Quidditch ne sait même pas si c'est celle qui l'arrange. C'est le cinquième jour qu'elle passe ici et elle a déjà l'impression de devenir chèvre, à ne rien pouvoir faire d'autre de ses journées que dormir ou attendre. Attendre quoi ? Sa sortie de l'hôpital, bien que sans surprise les médicomages lui aient annoncé que ce n'était pas pour tout de suite. Apparemment, avoir ignoré les symptômes d'une hémorragie interne et s'être pointée aux urgences – contre son gré – plus de douze heures après les faits, c'était une mauvaise idée. Comment elle pouvait le savoir, Maddy, que son mal de bide était plus que ça ? C'est vrai qu'elle était un peu fatiguée et que ses coéquipiers lui ont fait remarqué qu'elle était pale, mais elle avait peu dormi et s'était engueulée avec Alma alors ça pouvait être juste ça. Non vraiment, elle n'avait aucun moyen de deviner qu'elle couvait un plus gros mal qu'un lendemain de soirée de merde couplée à une dispute. En tout cas d'après sa mauvaise foi qui ajouterait qu'après tout elle n'est pas médicomage ni voyante. Et puis elle ne se sentait pas si mal que ça lorsqu'elle avait sa batte dans la main et des cognards en ligne de mire. Enfin, jusqu'à ce que tout devienne flou et que l'un d'eux – qu'elle voyait d'ailleurs en trois exemplaires – percute son balai, la faisant chuter comme une poupée de chiffon qui aurait pu se briser tous les os du corps plusieurs mètres plus bas si Aaron ne l'avait pas rattrapée avant. Enfin c'est ce qu'il lui a raconté donc il a sûrement exagéré les faits – c'est même sûr, si vous voulez l'avis de Maddy.

Évidemment, la joueuse de Quidditch n'a pas échappé aux vives remontrances de son capitaine dès lors qu'il a su qu'elle était sortie d'affaire. Mauvaise langue, elle serait tentée de dire qu'il aurait été capable d'engueuler son cadavre si ça lui avait permis de se défouler un peu. Non seulement elle a été réprimandée comme une gamine, ce qui lui a foutu les nerfs en pétard en un claquement de doigts, mais en plus elle a vu tous ses espoirs de récupérer son poste de batteuse, même temporairement, s'envoler. Brisés par Aaron lui-même tandis qu'il lui reprochait d'avoir été complètement inconsciente, ignorant tous ses excellents arguments au point qu'elle en a eu envie de lui arracher les yeux – et la langue, pour qu'il arrête de parler. À côté de cette altercation, même la visite d'Alma lui a semblé être un pur bonheur – elle exagère un peu –, et pourtant elle avait ce regard mêlant inquiétude et réprimande que la poursuiveuse déteste. Pourquoi tout le monde s'évertue à la traiter comme une gamine ? Parce qu'elle se comporte comme telle, sans doute... Enfin, au moins son amante lui a assuré qu'elle s'arrangerait pour qu'Alex puisse venir lui rendre visite malgré l'école, ce qui a au moins calmé un peu les ardeurs de la joueuse de Quidditch qui n'en finissait plus de crier à l'injustice et de se plaindre de son injuste capitaine. Elle n'a cependant pas pu lui donner de date précise pour sa venue – que Maddy aurait de toute façon eu bien du mal à retenir, puisque tous les jours se ressemblent à l'hôpital. Il n'y a que la bouffe qui change, mais pas ses complaintes à ce sujet évidemment. Là tout de suite, elle tuerait pour une barre hyperprotéinée. Pourtant, si la porte s'ouvre alors qu'elle vient à peine d'être traversée par cette pensée, Maddy se doute que c'est sur un infirmier qui ne lui en apporte pas et vient simplement prendre sa tension pour la énième fois aujourd'hui.

Lorsque la porte de sa chambre aseptisée et sans vie s'ouvre sans qu'un seul coup lui soit donné, Maddy est convaincue qu'elle va avoir affaire à un énième infirmier venu prendre sa tension ou vérifier que ses symptômes s'atténuent. Au lieu de ça, c'est Alex qui apparaît précipitamment en face, une magnifique surprise pour celle à qui il manquait tant. Pourtant, la poursuiveuse s'attendait tellement à ce qu'il lui saute dans les bras – enfin, autant que c'est possible avec une personne dans un lit d'hôpital – qu'elle est presque inquiète que ce ne soit pas le cas. Surtout lorsqu'elle le voit se figer juste là, tout proche d'elle mais pourtant si loin, et que son sac tombe le long de son bras sans que ça ne le fasse réagir. Elle ne sait pas quoi dire et le laisse simplement revenir à lui, troublée. Mais, plus que ça, c'est de la culpabilité qui envahit son cœur lorsqu'elle comprend que c'est à cause d'elle qu'il a cette mine déconfite. « Maddy… » Sa voix étranglée enfonce un poignard imaginaire dans le cœur de sa protectrice, même si le pauvre garçon n'y peut rien. Il est inquiet, ça se voit, et elle déteste ça. « Je vais bien, je t'assure. » Elle a cette voix confiante qu'elle a toujours lorsqu'elle veut convaincre quelqu'un, celle qui prouve qu'elle est la première  à croire à ce qu'elle dit – même lorsque c'est absurde, Alma ne manquerait pas de le souligner. Mais cette fois elle ne raconte pas n'importe quoi : d'après les professionnels de l'hôpital, elle est sortie d'affaire, donc Alex n'a aucune raison de s'inquiéter. La poursuiveuse doit juste laisser le temps à son corps de s'en remettre, ce qui n'est cependant pas une mince affaire.

Alex finit par retrouver la faculté de bouger et tire une chaise pour s'installer à côté d'elle. Il attrape alors sa main et la joueuse de Quidditch serre ses doigts entre les siens dans l'espoir de le rassurer un peu sur son état. « Qu’est-ce qui s’est passé ? J’suis désolé d’arriver que maintenant, l’école voulait pas que je parte en plein milieu de la semaine… » Adorable, voilà que le gamin embrasse sa main, mais c'est loin de convenir à la capricieuse poursuiveuse. « Sois plutôt désolé de ne pas me faire de câlin, sale gosse, » rétorque-t-elle en feignant d'être vexée. Un baise-main, vraiment ? Il vient de lui ajouter vingt ans dans les pattes, le morveux ! « Allez viens là. » assure-t-elle en ouvrant les bras pour qu'il puisse s'y blottir. Ses blessures ? Elle n'en a soudainement plus rien à faire, parce qu'il y a Alex et qu'il aura toujours bien plus d'importance à ses yeux que sa propre douleur. De toute façon, elle ne se sentira mieux qu'une fois qu'elle aura serré son protégé dans ses bras et l'aura convaincu qu'il n'a pas à s'inquiéter et que tout va bien – ça fait des jours qu'elle le répète, pourquoi personne ne veut la croire ?

Son câlin obtenu tel un caprice, Maddy se sent tout de suite un peu mieux. Les derniers jours ont été absolument affreux, entre les remontrances d'Aaron, sa sanction dans l'équipe – absolument injuste, bien sûr –, sa dispute avec Alma... Mais maintenant que le jeune Poufsouffle est là, c'est comme si tout avait disparu. Elle tient tellement à lui qu'en sa présence plus rien d'autre n'a d'importance à ses yeux. « J’ai pas eu le temps de t’acheter des fleurs mais j’t’ai apporté des barres de céréales. » La brune secoue la tête avec un léger rire. « Je préfère les barres de céréales de toute façon, » affirme-t-elle pour le rassurer sur le fait qu'il a très bien choisi. « En plus j'ai jamais eu la main verte, t'as bien vu mon appartement. » Pourquoi les gens s'obstinent à lui offrir des fleurs vouées à mourir dans son salon ou sa cuisine, déjà ? « T'aurais pas pu trouver meilleur cadeau, j'en rêve depuis que je suis arrivée ici. » Et elle a l'impression que ça remonte à une éternité. Alors dès lors qu'il lui en tend une, elle l'ouvre et en croque une bouchée avec une satisfaction immense qui peut se lire dans ses iris. « Merci mon grand, t'es le meilleur des visiteurs.  » Elle lui offre un nouveau sourire, toujours dans l'optique de le rassurer, souhaitant plus que tout qu'il cesse de s'inquiéter.